Production minière: pas sûr de faire mieux en 2022 avec l’insécurité Dixit Adama Soro, président de la Chambre des mines

• 17 mines, pour 2.300 milliards FCFA

• Pour des recettes d’exportation en 2021

• La CMB est reconnaissante des efforts faits par l’Etat

Le président de la Chambre des mines du Burkina, Adama Soro, est l’invité du Café de L’Economiste du Faso cette semaine. Avec les journalistes de la Rédaction, il aborde l’actualité du secteur minier, marqué par des attaques ciblées de groupes terroristes sur certains sites de production ; leur impact et surtout les stratégies pour préserver une activité qui ne rapporte pas qu’aux investisseurs : c’est 2/3 des recettes d’exportation ; 12¨% du PIB et 20% de recettes fiscales. En plus de l’insécurité, l’environnement socioéconomique international marqué par la hausse des prix du carburant, après la Covid-19, se ressent sur les performances du secteur.

L’Economiste du Faso : Jusqu’à quel niveau l’insécurité a impacté sur la contribution financière des sociétés minières dans les recettes de l’Etat burkinabè ?
Adama Soro, président de la Chambre des mines : Ce que vous touchez, ce n’est pas l’impact de l’insécurité sur la production, c’est simplement du factuel. De quoi s’agit-il ? En janvier 2022, il y a eu l’attaque terroriste de la mine de Ouare qui appartient au Groupe Avesoro, qui a aussi la mine de Youga. Vous me donnez là l’occasion de m’incliner sur la mémoire de tous les disparus de l’insécurité au Burkina Faso et singulièrement de nos collaborateurs qui nous ont quittés. A ce jour, les activités minières de Ouaré sont en arrêt et la mine de Youga est aussi en arrêt. Cela représente des productions en moins. Après, nous avons eu l’incident de la mine de Tarpako qui a aussi suspendu ses activités jusqu’à nouvel ordre.
L’incident malheureux de la mine de zinc de Perkoa (je m’incline sur la mémoire des 8 collaborateurs disparus), cette mine est aussi en arrêt. Enfin, l’attaque de la mine de Karma en juin 2022 a amené celle-ci à suspendre ses activités minières. Il y a eu des morts d’hommes avec malheureusement des employés de la mine. 3 sociétés de production d’or et une société de production de zinc en arrêt d’activités, forcément, cela impacte sur les recettes et autres taxes ; avec des employés en chômage technique. Les mines qui ne sont pas en arrêt d’activités, ce n’est pas évident qu’elles puissent produire plus. Certes, certaines sociétés minières ont connu divers problèmes que je ne nommerais pas ici. Certaines ont toujours des difficultés pour assurer une continuité normale de leur approvisionnement et surtout du transport du personnel de façon régulière.

Boungou et Essakane ?
Pas que ces deux sociétés minières. Il y a aussi d’autres qui ont du mal à assurer un approvisionnement régulier. Or, qui dit approvisionnement régulier dit ajustement de la capacité de la production minière. Ce n’est pas évident qu’en 2022, les sociétés minières arrivent à produire plus que les 66 tonnes de 2021.

Des mines sont en arrêt, pendant ce temps, le gouvernement burkinabè annonce l’entrée en production d’autres sociétés minières…
Pour l’instant, la seule mine, membre de notre faîtière, qui est prévue pour entrer en production d’ici fin 2022, c’est la mine de Bomboré Orezone.

A propos de l’insécurité, vous aviez dit à votre prise de fonction, je cite : « La Chambre des mines compte, entre autres, entamer des discussions avec les nouveaux ministres en charge de la sécurité et de la défense pour un partenariat en vue de renforcer les capacités des Forces de défense et de sécurité pour la sécurisation du pays et celle des mines ». Concrètement, comment cela va-t-il se faire ?
Permettez-moi de faire un préambule, à savoir que la sécurité comme d’autres aspects tels que la santé, l’éducation, etc., relèvent du rôle régalien de l’Etat. Après, vous avez d’autres acteurs qui peuvent accompagner dans la limite fixée par la loi. C’est ainsi que le secteur minier et d’autres entités économiques ont recours à des sociétés privées locales dûment enregistrées au Burkina Faso et agréées par les forces de sécurité. Depuis quelques années, la question sécuritaire se pose avec acuité, il y a une tension sur les effectifs, sur les moyens de nos valeureuses Forces de défense et de sécurité (FDS) (permettez-moi de leur rendre un vibrant hommage), les sociétés minières sont obligées, en tant que sociétés citoyennes, de voir comment les accompagner à nous sécuriser. Et ce partenariat avec les FDS est valable pour d’autres secteurs d’activités économiques. Pour exemple, avec la Covid-19, les mines ont apporté un appui aux structures sanitaires pour faire face à cette pandémie.
Tout récemment, des mines ont offert des bourses d’études. Mon propos, c’est qu’à un moment donné, il faut que tous les acteurs se donnent la main pour soutenir les FDS et ce, dans les limites autorisées par la loi, d’une part, et d’autre part, pour ce qui concerne les mines dans la limite de nos gouvernances en rapport avec les standards internationaux. Les sociétés minières sont cotées en bourse, de ce fait, il y a des actions que nous ne pouvons pas entreprendre. Exemple : doter les FDS des moyens létaux.
A contrario, nous pouvons aider à construire le mur d’un commissariat de police ou d’une salle de repos pour une caserne de gendarmerie. Vous n’ignorez pas que lorsqu’une mine est sécurisée, c’est aussi la localité qui abrite la mine qui est sécurisée.

Il est connu que l’insécurité impacte durablement les activités minières, cela n’entraine-t-il pas des charges supplémentaires ? En d’autres termes, n’y a-t-il pas des investissements supplémentaires en interne que les mines font pour sécuriser le site et le personnel ?
La première ressource d’une mine, c’est la ressource humaine. Il y a le cas malheureux de la mine de Karma qui, jusqu’à ce jour, engendre des traumatismes pour les employés. C’est la responsabilité en tant qu’entreprise de protéger nos employés. Une fois de plus, nous ne pouvons le faire qu’avec l’appui de l’Etat burkinabè, c’est-à-dire, les FDS. Mais en attendant, il faut que les sociétés minières puissent équiper leur site de production de moyens conséquents de protection tels que les barrières conformément à ce que la loi dit. Aujourd’hui, beaucoup de mines transportent leurs employés par les airs. La raison est simple, avec l’évolution de nouvelles méthodes de menaces avec les engins explosifs improvisés. Cela engendre effectivement des coûts supplémentaires. Mais la sécurité a un coût mais n’a pas de prix. Une mine avec 700, voire plus d’employés, les transporter par les airs sur une base quotidienne, cela coûte cher. L’autre difficulté, c’est l’incapacité des sociétés minières à faire de l’exploration.
Les permis d’exploitation sont sur des périmètres réduits, contrairement aux permis de recherche qui sont au minimum de 250 km2. La mine elle-même, c’est de 1 à 5 km2, alors que l’exploration prend plus de surface affectée par l’insécurité.
Permettez que je m’incline devant la mémoire de notre collègue, le géologue canadien, Kirk Woodman. Nous faisons quelques petites explorations mais pas plus, parce que nous ne pouvons pas permettre de nous éloigner au-delà d’une certaine distance. Par conséquent, pas d’exploration, demain, nous n’aurions pas de production d’or. Cela est un des coûts cachés de l’insécurité sur les activités minières.

A l’image de Boungou, Taparko et Karma, les sites miniers ne sont-ils pas devenus des cibles d’attaques terroristes ?
Malheureusement, oui. De plus en plus, nous assistons à l’évolution d’un autre type de menace. J’avoue sans faire dans la langue de bois que les sociétés minières en sont conscientes. L’Etat, sa priorité, c’est la sécurisation du Burkina Faso, et les mines font partie de ce territoire. Les mines ne demandent pas une sécurisation particulière. C’est dommage que souvent, certaines personnes nous attaquent en disant « les sites miniers ne sont jamais attaqués », c’est un faux procès. Les entreprises minières ont aussi payé un lourd tribut dans les attaques terroristes, en témoignent les attaques de Boungou, Taparko et Karma où il y a eu mort d’hommes.
Le chef de l’Etat a reçu les sociétés minières le 16 avril 2022, parce qu’on avait deux membres qui avaient suspendu leurs activités minières pour fait d’insécurité. En moins de 24 heures, il nous a reçus. Etant lui-même du métier des armes et connaissant mieux la question sécuritaire, pour avoir été commandant de région à Dori et à Ouahigouya. Nous avions en tout cas trouvé un chef de l’Etat conscient des enjeux sécuritaires. Cela dit, les défis sont immenses et les sociétés minières voient les efforts fournis par le gouvernement. A la suite d’autres rencontres précédentes, il est prévu dans les prochains jours, d’autres rencontres pour qu’ensemble, on puisse s’aider pour parer aux éventuelles menaces terroristes. Le secteur minier burkinabè, c’est 2/3 des recettes d’exportation,12% du PIB et c’est au moins 20% des recettes fiscales, soit ¼ des recettes du budget de l’Etat.
Donc attaquer le secteur minier, c’est chercher à crouler l’Etat. Fort heureusement, au haut sommet, cela est pris à bras-le-corps pour enrayer le phénomène terroriste. Cette préoccupation de l’Etat s’étend sur toute cible stratégique pour le pays. La CMB est reconnaissante des efforts faits par l’Etat vis-à-vis de ses membres.
La Rédaction

Encadré 1

A propos du Conseil burkinabè des mines
« le plus important, c’est la représentativité et la légitimité sur le terrain »

Le 26 octobre 2021, il a été mis en place le Conseil burkinabè des mines, de la géologie et des carrières (CBMGC), un concurrent ou un allié pour développer le secteur minier burkinabè ? La rédaction de L’Economiste du Faso a posé la question au président de la Chambre des mines. Et voici sa réponse :

« Oui, j’en ai entendu parler. Mais sachez que les membres de cette nouvelle association sont plus au moins issus de la même entité du secteur minier et qui sont également membres de la Chambre des mines du Burkina Faso (CMB). Mieux, nous continuons à défendre leurs intérêts. Nous les avons défendus sur des sujets sensibles liés à la sécurité que je ne voudrais pas étaler ici. Jusqu’à preuve du contraire, la CMB n’a reçu aucun courrier du CBMGC disant qu’ils ne sont plu membres de la CMB. Au demeurant, nous sommes en démocratie et j’avoue que personnellement, je n’ai pas de commentaire particulier sur le fait que d’autres personnes veuillent créer des associations similaires. La Constitution autorise la liberté d’association, donc les gens sont libres de s’associer.
Par contre, s’associer est une chose mais avoir la légitimité et la pertinence est une autre chose. La CMB a été créée en 2011 avec son ancêtre le Groupement professionnel des miniers du Burkina Faso (GPMB), créé en 1994. Hormis des pays comme l’Afrique du Sud, la Namibie, le Zimbabwe et le Ghana, le GPMB faisait partie des plus anciennes associations de l’Afrique, pour ne pas dire de la sous-région. Le GPMB s’est mué 15 ans après en CMB, nous avions eu plus tard des mines qui sont entrées en production. Le GPMB à sa création, était une faîtière essentiellement composée de compagnies d’exploration de recherche. En 2011, nous avions plus de 7 mines en production et plus de 700 permis de recherche.
Aujourd’hui, la CMB regroupe la quasi-totalité des sociétés minières en production ou en phase de recherche. La CMB est de nos jours, l’interlocuteur n°1 du gouvernement, c’est l’interlocuteur n°1 du secteur privé, la CMB est représentée à la Chambre du commerce du Burkina Faso, à travers ma modeste personne comme élu consulaire. Au niveau régional, la CMB assure la présidence de la Fédération internationale des mines de l’Afrique de l’Ouest pour un mandat de deux ans. Ce mandat est un honneur et une responsabilité faits au Burkina Faso. Pour moi, il n’y a pas de débat, dans le paysage institutionnel, national, international et régional, le premier acteur majeur est et demeure la CMB.

Pour vous, ce n’est pas une menace, encore moins une scission ?
Non, puisque les membres du CBMGC sont toujours membres de la CMB et continuent de bénéficier de l’aura et de l’accompagnement de celle-ci.

Parallèlement à cette structure, il y a le comptoir des acheteurs d’or, un membre de plus pour la CMB ?
Pourquoi pas. Pour la gouverne des gens, au niveau de la CMB, vous avez les membres titulaires avec 4 catégories (A, B, C et D).
-catégorie A : les mines en production,
-catégorie B : les mines en construction,
-catégorie C : la phase de recherche
-catégorie D : la mine semi-mécanisée
Il y a les membres affiliés, les membres associés et les membres d’honneur.
Les plus grands fournisseurs du secteur minier sont parmi nos membres affiliés. Maintenant, des corporations comme les comptoirs d’achat d’or, qui ne sont pas des miniers au sens propre du terme, ce sont des marchands d’or qui s’adressent à des groupes de cibles plus spécifiques, si leur regroupement peut donner plus de visibilité à leurs activités, tant mieux. Je ne vois pas les regroupements en termes de concurrence, le plus important, c’est la représentativité et la légitimité sur le terrain. Toute modestie mise à part, il sera difficile de faire mieux que la CMB sur le terrain en termes de crédibilité. Les 17 mines, c’est 2.300 milliards FCFA de recettes d’exportation en 2021. Cette somme résulte de la contribution essentielle des membres de la CMB. D’ailleurs j’invite cette association à être membre de la CMB qui est la maison commune du secteur.o
La Rédaction

Encadré 2

Contenu local: la loi étant nouvelle, il y a des ajustements à faire

Que fait ou peut faire la CMB pour l’effectivité du contenu local entré en vigueur le 1er janvier 2022, afin de permettre que les fournisseurs locaux puissent capter la manne financière conséquente du secteur minier ?
Excellente opportunité de clarifier deux points. D’abord, le bien-fondé du contenu local et de sa mise en œuvre depuis l’adoption de la loi. Primo : l’économie minière par définition dans nos pays en voie de développement se retrouve dans une forme d’économie enclavée. Vous savez que c’est la géologie qui impose l’installation d’une mine, ce qui fait que vous avez des mines qui sont dans des localités qui manquent de toutes les commodités économiques. Du coup, il y a une responsabilité sociale de l’entreprise minière de développer des initiatives pour s’intégrer davantage au reste de l’économie qui l’entoure.
Les sociétés minières sont obligées d’aller au-delà du concept achat/vente. C’est-à-dire que les mines doivent définir des critères pour choisir les fournisseurs locaux, les accompagner en termes de condition commerciale, leur faciliter l’accès au financement, en termes d’accompagnement technique, en termes d’accompagnement de gouvernance…, c’est notre responsabilité sociale.
Mais tout compte fait, cela reste une relation fournisseurs/clients, donc une relation commerciale. Cela veut dire que c’est une relation qui doit être regardée à l’aune de la compétitivité. Dans le même temps, les fournisseurs locaux doivent comprendre que la relation sur le moyen et long terme sera une relation de fournisseurs/clients. Au niveau de la CMB, depuis l’entrée en vigueur du décret le 1er janvier 2022, nous avions entamé des échanges avec la Direction générale de la promotion économique énergétique et minière (DGPEM) pour voir comment l’application va se faire.
A ce niveau, les discussions ont tourné autour de deux points. Le premier a porté sur les plans d’approvisionnement. Comme le décret a été adopté en novembre 2021 et l’arrêté le 30 décembre 2021, alors qu’il est dit qu’il faut que les plans d’approvisionnement soient fournis en année N-1 avant l’entrée en vigueur. La CMB ne disposait pas de ce délai, nous avions demandé un délai supplémentaire. Et en fin février 2022, les sociétés minières ont transmis leurs plans d’approvisionnement. La loi étant nouvelle, il y a des ajustements à faire. Le premier, ce sont les quotas.
Par exemple, vous prenez un contrat de mining, comment pourriez-vous attribuer y% à une entreprise internationale et x% à une entreprise locale pour le même contrat ? Il y a des difficultés d’ajustement de ce type. Mais c’est un fait normal, car c’est la première année de mise en œuvre. Notre Commission achat et logistique (parmi les 6 Commissions que compte la CMB) (celle-ci a le plus travaillé) a eu plusieurs sessions de travail avec la DGEPM, la Chambre du commerce et l’association des fournisseurs locaux, pour essayer de préparer le terrain à une bonne application de la loi sur le contenu local.
Le deuxième point a porté sur les contrats en cours. Une fois de plus, le bon sens des acteurs a prévalu. Il y a des contrats qui existaient avant l’adoption de la loi, or, vous savez qu’en Droit, la loi dispose pour l’avenir. Il y a le caractère rétroactif des lois qui est très encadré. Le bon sens voudrait qu’en ce qui concerne les contrats en cours, l’Etat puisse les laisser exécuter jusqu’à leur terme ; car, qui dit contrat, dit condition commerciale qui a été accordée sur deux aspects : le prix et le volume.
Avec les quotas, cela allait impacter sur le prix et le volume, toute chose préjudiciable aux entreprises minières. Pour éviter ce piège qui allait impacter sur la compétitivité des entreprises minières, elles ont suggéré à l’Etat de faire la dérogation pour que ces contrats antérieurs aillent jusqu’à leur terme.
L’un dans l’autre, nous n’avions pas eu 6 mois d’application, mais 2 à 3 mois, parce qu’il y a eu le report pour finaliser les plans d’approvisionnement et un autre report pour s’adapter au processus de mise en œuvre de la loi.

Encadré 3

Zoom sur le carburant: on paye 70% plus cher que le prix à la pompe

L’Economiste du Faso : En parlant de l’inflation, comment vos membres gèrent-ils la hausse du carburant ?
Adama Soro, président CMB : Je vais faire une analyse à deux niveaux : au niveau national et une analyse sous-régionale en filigrane avec l’environnement international.
Les éléments nouveaux de l’environnement international, ce sont la crise ukrainienne et les tensions sur le champ d’approvisionnement lié à la Covid-19. Ce qui fait qu’aujourd’hui, le carburant de la sous-région, dans la plupart des pays, est importé essentiellement de la Russie et des pays de l’Est. Ce qui signifie que la crise qui est en train de se dessiner va nous impacter en termes de disponibilité de produits d’abord.
Dans le même temps, l’Union européenne a pris des sanctions contre la Russie. Nous sommes plus liés en termes d’échanges commerciaux et de liens économiques avec l’Europe. Alors, même si le carburant est disponible, le paiement devient compliqué, à cause des sanctions, et dans toute cette évolution, il y a un embargo qui ne dit pas son nom et qui vient sur le pétrole russe. Du coup, nous allons nous retrouver dans une position où nous allons avoir du mal à nous approvisionner, avec son corollaire de coûts élevés, et je pense que nous tous nous le vivons à la pompe, on voit que le prix du carburant est élevé.
Maintenant, au niveau national, je prends le prix du gasoil, parce que c’est ce que nous utilisons le plus. Le secteur minier paye plus cher que tout le monde, parce que nous n’avons pas de subvention.
Du coup, quand le prix du Brent évolue, au niveau de la pompe, il évolue aussi au niveau minier. Entre décembre 2021 et janvier 2022, il y avait une corrélation entre ces 3 prix (le prix du Brent à l’international, l’évolution du prix à la pompe au niveau national et l’évolution du prix pour les miniers). Ils étaient plus ou moins alignés. Mais à partir de décembre et janvier, il n’y a plus d’alignement. Nos prix ont flambé au moment où les prix à la pompe et au niveau international sont toujours alignés.
Pour vous donner un ordre de grandeur, on estime aujourd’hui que l’on paye 70% plus cher que le prix à la pompe. Nos marges sont rognées parce qu’au moins 1/3 de coûts de production des mines est lié au carburant. Les plus petites mines sont à 3 millions de litres par mois, les moyennes entre 5 et 6 millions de litres par mois et les plus grandes sont entre 9 et 10 millions de litres par mois. C’est énorme en termes de consommation, ce qui nous affecte énormément.
Au niveau régional, quand on fait une comparaison, cette corrélation demeure dans les autres pays essentiellement : Mali, Sénégal, Côte d’Ivoire, etc. Au Burkina Faso , pendant longtemps, on a eu des augmentations très étalées sur le temps, contrairement à ces pays qui ont eu des petites augmentations rapides. L’augmentation au Burkina est plus importante. Cela fait que notre budget de carburant a explosé. En moyenne, nous avons décidé d’attribuer entre 1,2 et 1,3 dollar le litre, lors de l’élaboration des budgets 2022 et là, nous sommes à 2 dollars le litre. Maintenant, la risque est double, il s’agit du prix et de la disponibilité du carburant. Avec les sanctions internationales, l’Europe et les pays africains se retrouvent à la même source pour s’approvisionner en carburant, et comme l’Europe consomme beaucoup plus de carburant que nous, nous pays africains, nous nous retrouvons à la queue de la queue. C’est un risque qui se dessine. Des discussions ont lieu avec le nouveau DG de la Sonabhy et des mesures sont prises pour anticiper sur de nouvelles pénuries, mais le fait générateur de ces pénuries existe. Et on n’est pas à l’abri.
C’est pourquoi, nous au niveau du secteur minier, nous allons plaider afin qu’il y ait des mesures qui nous permettent de pouvoir nous approvisionner directement et enlever la charge d’importations mais toujours avec l’encadrement et l’accompagnement de la Sonabhy et sans préjudices des taxes et revenus de l’Etat. Nous voulons qu’on puisse permettre aux marketeurs locaux de nous approvisionner de façon sécurisée, afin d’assurer la continuité de nos opérations.


L’Economiste du FASO

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