La vie de la première mine de Zinc de l’Afrique de l’Ouest : une expérience douloureuse

Découverte en 1982, c’est le lundi 21 janvier 2013 que la mine de zinc du Burkina Faso est entrée en exploitation. Elle est située à Perkoa, à 135 km à l’ouest de la ville de Ouagadougou. Prévue pour une durée de 12 ans, son exploitation devrait représenter 0,6% de la production mondiale de zinc. Plus de 900 000 tonnes de zinc devraient être extraites de ce gisement.

Exploitée par les sociétés Glencore (Suisse, 50,1%), Blackthorn Resources (Australie, 39,9%) et Nantou mining (Burkina Faso, 10%), cette mine est une première en Afrique de l’Ouest. Elle a nécessité 250 millions de dollars (environ 102 milliards de FCFA) d’investissement et a été retardée, notamment en raison de la crise financière internationale, combinée à une baisse importante des cours du zinc sur le marché mondial lors de son entrée en production.

Dans le contrat signé avec l’Etat, l’entreprise Nantou mining s’est engagée, comme le code minier le dispose, à contribuer au développement socio-économique de la région.

De la production de la mine

Trevali Mining Corporation (“Trevali”) détient 90% de Nantou Mining Burkina Faso SA contre 10% détenus par l’Etat Burkinabé. 2018 a été une année de performance dans le secteur minier avec une production record de 165 100 tonnes de zinc, selon un document gouvernemental. A l’époque, la société employait 351 personnes (334 hommes, 17 femmes)

En 2021, La production de zinc affiche 166.343 tonnes, contre 152.540 tonnes en 2020, soit une hausse de 8,30% entre les 02 années.

De l’inondation à la mine de perkoa

Le 16 avril 2022, une inondation s’est produite sur la mine souterraine de Perkoa à la suite d’une forte pluie. Cela a entraîné une crue soudaine qui a emporté les bermes protectrices entourant la fosse à ciel ouvert. Huit travailleurs dont six Burkinabè, un Tanzanien et un Zambien ont été surpris par les eaux dans les galeries souterraines de la mine. Il s’agit de Charles Bama, Bayala Hervé, Yiboula Isaï Bayala, Aimé Fulgence Bationo, Thierry Bayala, Jean Noël Bationo, le zambien Nune N’Donji et le tanzanien James Marco Bwire Aritablos.

Les familles des employés coincés dans la mine de Perkoa ont porté plainte contre X pour « tentative d’homicide involontaire », « mise en danger » de vie d’autrui et « non-assistance » à personne en danger, le jeudi 28 avril 2022, dans une lettre émise par un cabinet d’avocats adressée au procureur du Faso près du tribunal de grande instance de Koudougou.

Plusieurs opérations de sauvetages ont été effectuées pour sauver les huit mineurs. Malheureusement quatre (04) premiers corps ont été le 24 mai 2022, deux (02) le 28 mai et un autre le 08 juin et le dernier corps le lundi 20 juin 2022. Après 66 jours de recherches, les huit (08) mineurs disparus suite à l’inondation ont finalement tous été retrouvés sans vie.

Avant d’être enterrés le vendredi 29 juillet, ils ont été élevés à titre posthume, au rang de Chevalier de l’Ordre Mérite du Commerce et de l’Industrie avec agrafe Mines et Carrières.

De la fermeture de la mine

Suite la plainte des membres de famille des mineurs disparus, un procès a eu lieu  au Tribunal de grande instance de Koudougou.

Le DG Hein Frey directeur général de Nantou Mining Burkina Faso est poursuivi pour exercice d’activités d’exploitation minières illégales, non-respect de la règlementation relative à la santé au travail et à la sécurité dans les mines, mise en danger de la personne d’autrui, non-assistance à personne en danger et des faits d’homicide involontaire. Entre autres faits constitutifs d’infractions, le tribunal a cité la modification de la fosse allant jusqu’à une profondeur de 710 mètres au lieu de 540 comme prévue par les études de faisabilité, l’abattage des piliers de sécurité entre la mine souterraine et celle à ciel ouvert.

Il a été déclaré par le Tribunal de grande instance (TGI) de Koudougou, le mercredi 14 septembre 2022, coupable d’homicide involontaire. Il a été condamné à 24 mois de prison avec sursis et une amende de 2 millions FCFA.

Le 16 septembre 2022, Trevali Mining a annoncé la démission de son PDG Ricus Grimbeek et du directeur de l’exploitation Derek du Preez. Ces départs interviennent dans un contexte difficile pour la compagnie minière canadienne.

Depuis le 16 avril 2022 (jour de l’inondation), la production de zinc est suspendue à la mine de Perkoa. Après avoir engagé des dépenses effectuées pour le pompage des eaux afin de retrouver les corps des 8 mineurs, la société fait face à un énorme besoin de financement pour effectuer un redémarrage des opérations.

Cette situation a contribué à mettre son propriétaire canadien au bord de la faillite. =A en croire Ditil Moussa Palenfo, l’un des responsables de Nantou Mining, la réhabilitation de la mine sinistrée est compromise par le manque de moyens financiers. « Les fonds sont à peine suffisants pour couvrir les indemnités de départ des employés licenciés », a-t-il ajouté, selon l’Agence Ecofin le lundi 26 septembre 2022.

La mine de zinc de Perkoa a annoncé sa fermeture jusqu’à nouvel ordre le vendredi 23 septembre 2022. Cette fermeture va entraîner la fin des contrats des travailleurs et forcément des pertes de revenus pour l’Etat.

De la liquidation de la mine

Trevali, la maison mère de la mine de zinc de Perkoa a annoncé qu’elle « a déposé une demande de liquidation auprès du Tribunal judiciaire de commerce du Burkina Faso ». L’information a été rendue publique dans un communiqué en date du 6 octobre 2022. Cette liquidation concerne les 90% d’actions détenues par Trevali dans le capital de la mine de Natou Mining.

Le 14 novembre 2022, Trevali Mining, annonce dans un communiqué que le tribunal de commerce a rendu une ordonnance en faveur de la liquidation judiciaire de Nantou Mining.

L’ordonnance du tribunal a également nommé un liquidateur pour prendre en charge la gestion des affaires de Nantou Mining et superviser toute la procédure de cession des actifs. La filiale, de même que Perkoa, ne sont désormais plus sous le contrôle de Trevali. La première mine de Zinc de l’Afrique de l’Ouest sera-t-elle encore opérationnelle un jour ?

Safa-ou KABORE

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