Terres rares : où en sont les futurs producteurs africains

De retour dans l’actualité minière avec la volonté de Donald Trump de s’emparer des réserves ukrainiennes, les terres rares, en dépit de leur appellation, ne sont pas aussi rares qu’on pourrait le penser. Leur production est néanmoins concentrée en Chine, qui impose des restrictions sur ses exportations au gré des tensions commerciales avec les pays occidentaux. Alors que ces derniers cherchent à réduire leur dépendance  vis-à-vis de Pékin, les pays africains qui disposent de réserves de terres rares se positionnent comme des alternatives. Tour d’horizon des progrès de ces futurs producteurs.

Les terres rares sont un groupe de 17 métaux dont certains sont très demandés dans l’industrie automobile, la Défense ou le secteur de l’énergie éolienne. Selon un rapport de Benchmark Minerals, huit nouvelles mines de terres rares devraient entrer en production d’ici 2029 en Afrique, permettant au continent d’assurer 9 % de l’approvisionnement mondial. Cinq pays au moins sont en pole position pour concrétiser cette prévision.

  1. Financement bouclé pour la première mine de terres rares d’Angola

L’Angola se positionne comme un acteur clé dans l’émergence d’une industrie africaine des terres rares. La société britannique Pensana a annoncé mardi 18 mars avoir sécurisé un financement de 268 millions de dollars pour le lancement de sa première phase d’exploitation de la mine de Longonjo.

Ce financement repose sur un prêt syndiqué de 160 millions de dollars, auquel participent l’Africa Finance Corporation (AFC) et la banque sud-africaine Absa, ainsi que sur des investissements en fonds propres et en prêts convertibles du fonds souverain angolais (FSDEA) et de l’AFC. À terme, Longonjo devrait produire environ 20 000 tonnes par an de MREC (Mixed Rare Earth Carbonate), un concentré de terres rares destiné à la fabrication d’aimants permanents, essentiels pour les véhicules électriques et les éoliennes.

Pensana affirme que la mine créera plus de 430 emplois directs dès la première phase et jusqu’à 2 400 en régime de croisière. Avec une durée de vie estimée à plus de 20 ans et des réserves prouvées de 30 millions de tonnes à 2,55 % de TREO (oxydes de terres rares totaux), Longonjo ambitionne de fournir 5 % de la production mondiale de terres rares à aimants. La compagnie n’a pas précisé de date pour le début de la production de la mine.

Image 1 Longonjo
  1.       Mise en service attendue en 2026 pour la première mine du Malawi

Le Malawi, un autre acteur prometteur du secteur africain des terres rares, se prépare à lancer son projet Kangankunde. Grâce à un investissement initial de 40 millions de dollars, la mine devrait finalement entrer en service au premier trimestre 2026, au lieu du dernier trimestre 2025 initialement prévu.

Lindian Resources, qui pilote le projet, a annoncé en décembre 2024 la signature d’un accord de vente avec Gerald Metals. Cet accord devrait lui fournir un financement de 50 millions $ qui couvrirait entièrement les coûts de développement de la phase 1 de Kangankunde. Cette phase prévoit la production de 685 716 tonnes de concentré de terres rares sur une période de 45 ans.

  1.       L’Afrique du Sud héberge « le projet le plus rentable en dehors de la Chine »

En Afrique du Sud, Rainbow Rare Earths avance sur son projet Phalaborwa, présenté comme le plus rentable en dehors de la Chine, selon les données d’Argus Limited. Une étude publiée en décembre 2024 a confirmé la solidité financière du projet, qui affiche une valeur actuelle nette après impôt de 611 millions $.

Le coût en capital a été réévalué à 326,1 millions de dollars, en légère hausse par rapport aux 295,5 millions $ de l’étude de 2022. Phalaborwa devrait produire environ 1 900 tonnes d’oxydes de terres rares à aimants par an sur une durée de vie de 16 ans. Aucune date n’a été fournie pour l’entrée en production de la mine, alors que la société cherche encore à obtenir un permis minier.

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  1.       En Tanzanie, le projet Ngualla attend le feu vert de Pékin

Le projet Ngualla en Tanzanie, piloté par Peak Rare Earths, est l’actif phare de la Tanzanie dans le secteur des terres rares. Il dispose d’une durée de vie estimée à plus de 24 ans, avec une production annuelle prévue de 16 200 tonnes de concentré de terres rares, dont 3 600 tonnes de néodyme et praséodyme, deux métaux de terres rares utilisés notamment dans l’industrie éolienne et celle des véhicules électriques. Il est néanmoins difficile d’évaluer le rôle que peut jouer ce projet dans la réduction de la dépendance mondiale à la Chine.

Le chinois Shenghe Resources est en effet le premier actionnaire de Peak, avec 19,9 % d’intérêts, et a conclu en juillet 2024 un accord pour acquérir une participation de 50 % dans la société locale détenant 84 % du projet Ngualla. A la clé, un financement de 96 millions de dollars australiens (61 millions $), mis à disposition par Shenghe sous la forme d’une facilité de crédit, qui permettra de développer la mine. La compagnie chinoise a également sécurisé l’achat de 100 % de la future production de concentré de la mine sur 7 ans.

L’accord entre Peak et Shenghe n’est pas encore définitif, en raison des nouvelles réglementations proposées par la Chine sur le contrôle des mines et des quotas de production de terres rares, qui pourraient affecter les structures de transaction envisagées. En conséquence, Peak explore d’autres options, notamment en cas de nécessité de restructurer la transaction avec Shenghe. Le début des travaux de construction de la mine, prévu pour janvier 2025, est donc toujours attendu.

  1.       En Ouganda, le projet Makuutu en quête de financement

Les ambitions de l’Ouganda dans le secteur des terres rares sont portées par Ionic Rare Earths et son projet Makuutu. Ce dernier affiche des réserves prouvées de 172,9 millions de tonnes à 848 ppm de TREO (oxydes de terres rares totaux) et une durée de vie initiale de 35 ans. La première phase du projet prévoit une production annuelle de 1 160 tonnes d’oxydes de terres rares en moyenne, grâce à un investissement initial de 120,8 millions de dollars.

Malgré ces indicateurs positifs, l’évolution du marché a conduit Ionic à ralentir le développement du projet au cours du second semestre 2024. Initialement prévue en 2026, la date de la première production commerciale est désormais incertaine. La concrétisation des financements en cours sera déterminante pour la suite du projet, alors que la volatilité des prix des terres rares et la dépendance aux investisseurs étrangers restent des défis majeurs. Le gouvernement ougandais a accordé en janvier 2024 un permis minier à la société pour Makuutu.

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Selon la base de données des projets miniers africains d’Ecofin Pro, la plateforme d’Ecofin destinée aux professionnels, d’autres pays comme le Mozambique (Monte Muambe), ou la Namibie (Lofdal) sont également bien positionnés pour rejoindre le cercle des producteurs.

Agence ecofin

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