La Chine fournit 70 % du graphite mondial et est à ce titre un acteur incontournable du marché. La décision de Pékin d’imposer des permis d’exportation sur les produits en graphite pourrait cependant redistribuer les cartes à moyen terme, en faveur de certains pays africains notamment.
Premier producteur mondial de graphite, la Chine va imposer des permis d’exportation sur trois types de produits en graphite à partir du 1er décembre 2023. C’est l’annonce faite le 20 octobre par le ministère chinois du Commerce qui précise qu’il s’agit d’une décision destinée à protéger « la sécurité et les intérêts du pays ».
En réalité, les nouvelles restrictions sur le graphite constituent le dernier coup porté par la Chine dans sa guerre commerciale avec l’Occident, les États-Unis et l’Union européenne notamment. Quelques jours avant l’annonce de la décision, Washington a élargi les restrictions sur l’accès des entreprises chinoises aux semi-conducteurs, alors que l’UE envisage des droits de douane sur les véhicules électriques provenant de Chine, sous prétexte qu’ils bénéficient de subventions injustes.
Les produits concernés par les restrictions sont utilisés dans l’industrie des batteries pour véhicules électriques, rendant les constructeurs automobiles européens et américains dépendant des chaines d’approvisionnement chinoises. Pékin représente en effet 70 % de l’approvisionnement mondial en graphite naturel et synthétique.
Quel intérêt pour l’Afrique ?
La domination chinoise sur le graphite est progressivement contestée par l’émergence de nouvelles chaines d’approvisionnement en dehors de l’empire du Milieu. Parmi les pays au cœur de cette contestation, on retrouve le Mozambique, Madagascar et la Tanzanie, les trois plus grands producteurs africains de graphite. Le Mozambique abrite même la plus grande mine de graphite en dehors de l’empire du Milieu, avec le projet Balama piloté par l’australien Syrah Resources.
En septembre dernier, les États-Unis ont approuvé un prêt pouvant atteindre 150 millions de dollars au profit de la mine de graphite Balama. Un financement qui s’inscrit dans le cadre de la stratégie de Washington visant à réduire la dépendance américaine aux minéraux critiques provenant de Chine. La récente décision de Pékin pourrait donc renforcer le soutien des États-Unis au développement de projets africains de graphite, mais pas seulement.
La réduction de l’offre chinoise peut en effet inciter encore plus les fabricants de matériaux en graphite à se tourner vers d’autres chaines d’approvisionnement, selon Tony Alderson, analyste chez Benchmark Minerals, un cabinet spécialisé sur les minéraux essentiels à la transition énergétique. Une situation qui profiterait donc aux producteurs africains de graphite, non seulement en matière de financements des projets, mais aussi du point de vue des prix.
Cette année, les prix du graphite naturel ont chuté de plus de 30 % selon Benchmark, dans un contexte de stocks élevés chez les consommateurs et d’offre excédentaire. Syrah Resources a même dû suspendre la production pendant plusieurs mois face à cette situation. Avec moins de graphite disponible sur le marché international, les stocks pourraient baisser et les prix remonter, stimulant en retour la production africaine de graphite.
Agence ecofin