Minerais stratégiques : le cadre de coopération RDC–États-Unis–Rwanda mis en place
Le 4 décembre 2025 à Washington, le cadre de coopération triangulaire République démocratique du Congo (RDC)–États-Unis–Rwanda sur les minerais stratégiques a été officiellement mis en place. Paraphé le 7 novembre, le Cadre d’intégration économique régionale (CIER), volet économique de l’accord de paix, a été signé entre Kinshasa et Kigali. Parallèlement, deux accords bilatéraux (Washington–Kinshasa et Washington–Kigali) ont été conclus. Ces deux derniers documents ont été signés en marge de la cérémonie organisée à l’Institut américain pour la paix, qui a réuni les chefs d’État Félix Tshisekedi (RDC), Paul Kagame (Rwanda) et Donald Trump (États-Unis).
Lors d’une conférence de presse donnée par la délégation congolaise à Washington, le vice-Premier ministre en charge de l’Économie nationale, Daniel Mukoko Samba, a justifié la mise en place de ce cadre triangulaire : « en même temps que la relation entre la RDC et le Rwanda est censée prendre une forme plus paisible, de prospérité partagée, il est également important pour celui qui a été le parrain [de] sécuriser son accès aux métaux critiques ». Et d’ajouter : « le monde, tel qu’il évolue aujourd’hui, se détermine, pour les États qui aspirent à devenir puissance mondiale ou qui veulent demeurer puissance mondiale, par l’accès aux métaux critiques ».
Aujourd’hui gouverneur de la Banque centrale du Congo (BCC), André Wameso — qui a participé aux négociations avec le Rwanda et les États-Unis — indique que le CIER permet que l’accès aux ressources stratégiques dans l’est de la RDC soit désormais négocié directement avec les autorités nationales. Pour cet ancien conseiller économique de Félix Tshisekedi, la guerre qui ravage l’est du pays depuis 30 ans ne serait pas née d’un conflit RDC–Rwanda, mais d’une stratégie occidentale visant à accéder aux minerais du pays en contournant les autorités de l’époque, opposées à la privatisation du secteur.
Pacte minerais contre sécurité
Le CIER vise, selon les mots de Donald Trump, « une nouvelle ère d’harmonie et de coopération » entre Kinshasa et Kigali, en s’attaquant à ce qui alimente le conflit depuis des décennies : l’opacité des chaînes d’approvisionnement en minerais critiques. Selon les autorités américaines, cette démarche « libère le vaste potentiel économique de la région des Grands Lacs et crée des opportunités pour le secteur privé américain ». « Il y a une richesse immense dans cette terre magnifique », a déclaré le président américain, promettant d’y envoyer « de grandes entreprises américaines ». « Nous allons extraire certaines des terres rares… et payer. Tout le monde va gagner beaucoup d’argent », a-t-il ajouté.
En discussion depuis plusieurs mois, le pacte « minerais contre sécurité » entre la RDC et les États-Unis a donc été mis en place. Selon les autorités congolaises, deux documents ont été signés : un accord de partenariat stratégique portant sur les questions commerciales et économiques, et un protocole d’accord sur les questions de sécurité et de défense.
« La relation entre le gouvernement américain et le gouvernement congolais a pris une autre dimension… Jusque-là, les relations économiques entre la RDC et les États-Unis étaient régies par un accord de promotion et de protection réciproque des investissements, conclu en 1984. Et aujourd’hui, on est des partenaires stratégiques sur les questions économiques et de commerce, sur les questions de défense et de sécurité, sur les questions de sciences et de technologie, et sur des questions institutionnelles et de gouvernance », résume Daniel Mukoko Samba.
Prémices
De leur côté, les États-Unis et le Rwanda ont signé « l’Accord-cadre pour une prospérité économique partagée ». Selon la presse, ce texte concerne également les minerais stratégiques. En octobre 2025, les États-Unis ont reçu leur première cargaison de concentré de tungstène en provenance du Rwanda, issue de la mine Nyakabingo et traitée en Pennsylvanie, dans le cadre d’un partenariat entre Trinity Metals, le raffineur américain Global Tungsten & Powders et le négociant Traxys.
Dans la perspective d’un renforcement des relations économiques entre Washington et Kinshasa, plusieurs entreprises américaines sont déjà actives en RDC, notamment Kobold Metals (secteur minier) et Starlink (Internet par satellite). Les États-Unis sont par ailleurs impliqués dans le développement du corridor de Lobito, qui ouvre les régions minières du sud-est de la RDC vers l’Atlantique.
Mais pour les autorités congolaises, le cadre de coopération triangulaire RDC–États-Unis–Rwanda ne pourra réellement entrer en vigueur qu’une fois la paix revenue dans l’est du pays. Or celle-ci reste pour l’instant incertaine, malgré la signature de l’accord de paix du 27 juin à Washington. Ces derniers jours encore, de violents affrontements ont été signalés dans le Sud-Kivu, provoquant de nouveaux déplacements de population.
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