Burkina Faso : la mine de Karma court vers un drame social comme celle de Poura
La mine de Karma est quasiment à l’arrêt. Elle a subi des attaques terroristes répétitives qui ont fait des victimes et, surtout, des conflits entre actionnaires de la Holding qui détient la majorité des actions. Cette dernière situation explique l’éviction depuis août dernier de Stefan Maré, directeur général adjoint de la holding par le conseil d’administration. La holding qui a racheté Riverstone Karma est actionnaire à hauteur de 22% de Néré Mining. Ces tensions entre actionnaires ont de répercussions graves sur les travailleurs et surtout sur la situation comptable de la mine.
En effet, en mars 2022, la holding Néré Mining rachetait Riverstone Karma SA pour 25 millions de dollars. Cette acquisition a effectivement suscité un espoir non seulement pour les burkinabè mais aussi pour les africains en ce sens qu’elle consacrait la prise de contrôle d’une société minière locale par des investisseurs locaux notamment burkinabè. Malheureusement la mine de Karma va vite subir des attaques terroristes qui vont semer des troubles et des mésententes entre les actionnaires avec des conséquences lourdes qui risquent d’entrainer sa fermeture.
Entre des menaces d’attaques terroristes et conflit interne (entre actionnaires), la mine fonctionne aujourd’hui au ralenti. Elle a perdu la majorité de ses fournisseurs et sous-traitants. Une partie du personnel est en chômage technique ou relocalisée dans la ville voisine de Ouahigouya à 17 km du site des opérations.
« Notre résultat est déficitaire, le malaise grandit au sein du personnel et l’on assiste à une vague de démissions et de licenciements. Mon objectif est de sauver les emplois locaux (Karma emploie quelque 600 collaborateurs et un millier d’emplois indirects) » c’est ce qu’explique Stefan Maré lors d’un interview accordé à Financial Afrique.
En plus, la mine nationale semble être aujourd’hui ‘’un deal’’ de plus ou une ‘’entreprise familiale’’ selon l’actionnaire Maré.
« Alors que les départs se multiplient à Karma, Elie Justin Ouédraogo, devenu PDG de Néré Mining, continue à nommer des proches à des postes de responsabilité au sein de la mine. A titre d’exemple, son fils cumule les postes de responsable des affaires administratives, de responsable des achats et de directeur des relations communautaires. Dans un tel climat, le directeur administratif et financier de la holding a démissionné, celui de Riverstone Karma a aussi jeté l’éponge deux mois après le rachat ainsi que le responsable des achats. Le métallurgiste et plusieurs géologues ont quitté le navire. »
Enfin, l’éviction de Stefan Maré de son mandat social de directeur général adjoint et son remplacement par Grégory Quérel qui essaie depuis Paris, de diriger une société basée au Burkina Faso a contribué à empirer les choses. En rappel, Stéphan Maré a été révoqué de manière brutale depuis août dernier de son mandat social de directeur général adjoint au motif qu’il n’aurait pas anticipé les attaques terroristes dont la mine de Karma est victime. Chose qu’il trouve injuste car au même moment, son directeur général Grégory Quérel qui est le patron de la société est toujours en place.
Toutes ces difficultés risquent de conduire la mine de Karma à sa fermeture et les travailleurs au chômage. Karma fait vivre plus d’un millier de personnes à travers des emplois directs et indirects. En plus elle est un bouclier et un rempart pour la ville de Ouahigouya contre l’infiltration des groupes armés. C’est la seule industrie de la région du Nord, éprouvée par les conséquences de l’insécurité.
Pour Stéphan Maré « Si rien n’est fait, je redoute un drame social comme à Poura, première mine du pays fermée dans les années 90 pour mauvaise gestion ». Il appelle alors à l’implication de l’Etat au regard des risques élevés de pertes d’emplois d’autant que le site est aux portes des zones contrôlées par les groupes armés. Karma a besoin d’être consolidé et renforcé.