RDC : 7 % de la déforestation due aux mines, un impact climatique sous-estimé

Le rapport souligne que la perte du couvert forestier engendre des perturbations climatiques qui aggravent la vulnérabilité des communautés locales, dont le raccourcissement de la saison des pluies, l’augmentation des séquences de sécheresse et la hausse des températures.

La perte du couvert forestier liée à l’exploitation minière dans le Sud-est de la RDC a des répercussions graves sur le climat, qui se manifestent notamment par des fluctuations des précipitations et une hausse de la température, selon un rapport publié le dimanche 15 décembre 2024 par Africa Resources Watch (Afrewatch), une ONG qui milite pour une exploitation juste et équitable des ressources naturelles en Afrique.

Intitulé « Etat de lieux de la déforestation dans les provinces minières de Lualaba et Haut-Katanga : cas des zones d’exploitation minière situées dans l’arc cuprifère katangais », le rapport se base sur une étude de l’évolution du couvert forestier dans les provinces minières du Lualaba et du Haut-Katanga, mais plus spécifiquement l’arc cuprifère katangais appelé aussi « la ceinture du cuivre » dans le Sud-est du pays. Cette région est occupée à hauteur de 84% par les écosystèmes forestiers de Miombo, qui sont très déterminants dans la régulation du climat dans les deux provinces au regard de leurs effets sur le cycle de carbone et celui de l’eau.

Les analyses menées ont consisté à faire des comparaisons de l’évolution du couvert forestier pendant trois périodes, en l’occurrence avant, pendant et après la libéralisation du secteur minier en RDC. Une corrélation a été ensuite établie entre la dynamique du couvert forestier et la tendance des variables climatiques observées dans la zone d’étude pour tirer des conclusions.

Cinq entreprises minières opérant dans les provinces de Lualaba et du Haut-Katanga (Commus, Mumi et Metalkol, Ruashi Mining et Société d’Exploitation de Kipoi) ont servi d’échantillon pour déterminer, sur la base des superficies respectives occupées par leurs opérations, leur apport à la déforestation. Les résultats obtenus ont été extrapolés à un effectif allant jusqu’à 75 compagnies minières.

Les diverses analyses ont fait ressortir que les activités anthropiques, notamment minières, que ces deux provinces connaissent depuis la libéralisation du secteur minier en 2002 ont conduit à une diminution sensible des superficies forestières.

Les activités minières dans les provinces du Haut-Katanga et du Lualaba sont concentrées dans l’arc cuprifère du Katanga, avec plus de 200 sites cupro-cobaltifères et une forte présence des carrés miniers octroyés aux entreprises. Cette zone connaît une très forte déforestation qui se matérialise par la fragmentation, la dégradation et le recul sans cesse de l’étendue des forêts, depuis l’arrivée des entreprises minières en 2002.

Des dizaines de mégatonnes d’équivalent CO2

Le rapport précise que la province du Haut-Katanga a perdu, entre 2001 et 2023, 7120 km² de couvert forestier, dont 498,4 km² sont directement liés à l’exploitation minière.   

a province du Lualaba a, quant à elle, connu une perte de forêt de 5550 km² pendant la même période, dont 388,5 km² sont dus aux opérations minières.

La déforestation implique deux choses, à savoir les émissions de gaz à effet de serre dans l’atmosphère et la réduction de la capacité d’une forêt à réguler ceux-ci par le biais de la photosynthèse. D’après les données de Global Forest Watch, une plateforme en ligne qui fournit des données et des outils pour la surveillance des forêts, les deux provinces ont émis respectivement 198 mégatonnes d’équivalent CO2 (MtCO2e) et 286 MtCO2e à cause des pertes du couvert forestier qu’elles ont subies entre 2021 et 2023. Durant cette même période, la déforestation due à l’exploitation minière a été à l’origine de l’émission de 20 MtCO2e pour le Haut-Katanga et de 13,86 MtCO2e pour le Lualaba.

Cette situation a des répercussions graves sur le climat de ces deux provinces, au point qu’il a changé. Des fluctuations des précipitations et une hausse de la température ont été observées dans la région, selon plusieurs études menées sur dernières années. Ces perturbations, qui se manifestent, entre autres, par l’allongement de la saison sèche, le raccourcissement de celle des pluies, l’augmentation des séquences de sécheresse pendant la saison de pluie et l’augmentation des températures qui atteignent parfois des valeurs extrêmes. Cela accentue la vulnérabilité des communautés locales en impactant négativement la production agricole, principale activité économique dans la région, et la sécurité alimentaire. En outre, la variabilité climatique s’accompagne parfois de fortes pluies provoquant des inondations, des glissements de terrain et une érosion des sols, augmentant le risque de maladies et de destruction des cultures et des habitations.  

Pour atténuer les effets néfastes de l’exploitation minière sur le climat, Afrewatch recommande aux autorités congolaises d’imposer un seuil acceptable d’émission de gaz à effet de serre à ne pas dépasser par les entreprises minières, d’instaurer une taxe carbone dans le secteur extractif pour soutenir les efforts d’adaptation au changement climatique dans les communautés impactées par l’exploitation minière et de renforcer le cadre légal et réglementaire du secteur minier pour préserver les écosystèmes forestiers. L’ONG appelle également les compagnies minières à prendre des mesures pour financer l’adaptation aux changements climatiques des communautés locales impactées par leurs projets, à publier annuellement un inventaire de gaz à effet de serre émis dans l’atmosphère à cause de leurs activités et à prendre des mesures adaptées pour réduire ces émissions.

Agence ecofin

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